Le 5 avril, l’association PREVER a organisé une visite de stations de lisier de porcs sur le Pays de Brest. Une journée riche en enseignements à plus d’un titre! Sur le territoire du Pays de Brest, 210 exploitations ont mis en place 114 stations de traitement (102 pour le porc, 12 pour la volaille). Le procédé de traitement le plus répandu est le traitement biologique, le même que pour les stations d’épuration des effluents urbains. En visitant trois stations, nous avons vu un panel de situations : traitement collectif et individuel, divers procédés de traitement. Comme Messieurs Clément et Menez, de la société « Eau du Ponant », en charge de l’assainissement pour BMO (Brest Métropole Océane) nous ont accompagnés lors cette visite, nous avons pu faire un parallèle intéressant entre le traitement des effluents d’élevage et des effluents urbains.

114 stations de traitement sur le Pays de Brest

Plus de 85 % de stations de traitement de lisier sont de type biologique avec boues activées (le même type que pour les stations d’épuration des effluents urbains). Le procédé est représenté dans le schéma ci-contre. Il permet d’abattre de l’azote (N) jusqu’à 90 % et d’exporter le phosphore (P205) jusqu’à 85 %. Les phases de traitement sont les suivantes : le lisier est homogénéisé dans une première fosse avant de passer par un séparateur de phases qui décompose le produit en deux parties: un refus solide stocké sur une plateforme couverte, et un produit liquide qui est acheminé vers une deuxième fosse. Le refus solide est riche en phosphore et contient un peu d’azote. C’est un bon fertilisant qui est exporté vers les régions céréalières, il vient remplacer les engrais chimiques dans ces zones. Le produit liquide subit une réaction biologique de nitrification/dénitrification (par apport d’oxygène dans la fosse) qui permet d’abattre l’azote par évaporation dans l’air. Suite à cette réaction, le produit liquide est séparé une nouvelle fois en deux parties : d’une part de boues faiblement dosées dans les trois éléments fertilisants (azote, phosphore, potasse) qui sont épandues sur les parcelles en proximité par tonne à lisier. D’autre part de l’eau de couleur sombre (ne contenant pratiquement plus d’éléments fertilisants, sauf de la potasse) qui est stockée dans une lagune et épandue sur les pâtures par irrigation. Il faut noter que les trois produits sortant d’une station de traitement de lisier, le refus solide, les boues, et l’eau n’ont plus d’odeur.

'

Le point de vue de l’association PREVER:

Depuis une dizaine d’années, les stations de traitement de lisier se sont mises en place sur le Pays de Brest comme dans les secteurs de Bretagne les plus concentrés en élevage hors sol. Ces investissements importants qui ont, bien sûr, bénéficié de financement public (de 10 % à 40 %) ont été réalisés et financés principalement par les éleveurs (de 90 % à 60 %). Ils ont permis d’abattre une part importante d’azote et de phosphore et d’améliorer de manière significative la fertilisation des cultures en évitant les excès. Tout ceci a une incidence significative sur la qualité des eaux.
Nous estimons que cette réalité est méconnue de la part du grand public, c’est la raison d’être de cette publication. Nous souhaiterions que nos médias locaux s’intéressent à un tel sujet. Le sujet de la pollution d’origine agricole a souvent fait la une de la presse. N’est-ce pas le moment de communiquer largement sur les efforts réalisés par les agriculteurs en matière d’environnement ?

Retour

 En 2012, la Bretagne compte 440 stations de traitement des effluents d’élevage (porc et volaille) soit quelques 630    éleveurs équipés de traitements individuels et collectifs. Les chiffres pour le Finistère sont les suivants : 268 stations  (230 pour le traitement du lisier de porc et 38 pour le traitement des fientes de volaille) et 417 élevages concernés. Pour le Pays de Brest, on compte 114 stations de traitement, 102 pour le traitement du lisier de porc et 12 pour le traitement de fiente de volaille. Au final, ce sont 210 exploitations qui ont investi dans ces procédés.
La carte présente la répartition de ces stations sur le territoire du Pays de Brest

Avril 2013

Le point sur le traitement du lisier pour le Pays de Brest

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Mrs Trebaol et Milin, deux des éleveurs du GIE de Landonnet Une station de traitement, c'est un hangar pour le résidu solide et des fosses pour les liquides Le résidu solide est exporté dans les régions céréalières

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Le traitement biologique, le procédé le plus répandu

 

 

 

 

 

 

 

 

Mr Priser, l'un des éleveurs du GIE Kermagon La machine smelox qui transforme le lisier en solide et en liquide épuré peut être fixe ou mobile Le liquide épuré est stocké dans une lagune avant épandage par irrigation

 

Le GIE Lodennet à Milizac, une station biologique pour 6 éleveurs

En 2004, six éleveurs habitant sur Milizac, Brest et Bohars se sont associés au sein du GIE (Groupement d’Intérêt Economique) Lodennet pour traiter ensemble les excédents de lisier provenant de leurs élevages. Dès le départ, l’objectif, en se regroupant est de choisir un procédé efficace et économiquement supportable. La réflexion et les études ont duré deux ans. Au final, c’est un procédé biologique (cf paragraphe ci-dessus) qui est retenu avec une station créée de toute pièce et située à une distance raisonnable de chaque exploitation de manière à prévoir l’arrivée du lisier à la station par canalisation enterrée et à être suffisamment éloignée de toute habitation. Les travaux de construction de la station ont duré presque un an et la station est mise en service en août 2007. Cette station traite 17 500 m3 de lisier et permet d’abattre 81 % d’azote et 76% de phosphore. Le plan d’épandage des six élevages était de 470 ha. Il est ramené à 90 ha, ainsi la station permet de libérer 380 ha de plan d’épandage pour des élevages voisins à dimension plus modeste. A la sortie, on obtient trois produits : un produit organique solide (880 tonnes) qui est exporté vers les régions céréalières, des boues (3 200 m3) qui sont épandues par tonne à lisier (principalement pour la culture du maïs) et un liquide (11 000 m3) épuré en azote et en phosphore qui est épandu par irrigation sur les surfaces en herbe. Pour faire fonctionner la station, les éleveurs ont pris l’option de se répartir les différentes tâches entre eux : suivi du process - gestion des transports - suivi biologique – entretien - comptabilité. Par ailleurs le pilotage de la station se fait par informatique, un contrat de maintenance a été passé avec la société qui a installé la station et un système de sécurité est en place. Selon Jean Yves Trébaol, l’un des éleveurs, « Le coût d’investissement est de 900 000€ financé à 60 % par les éleveurs, 20 % par l’Agence de l’Eau, 10 % par le Conseil Régional, 10 % par le Conseil Général. Le coût de fonctionnement par m3 de lisier est à 7/8 €/m3 dont la plus grande part est l’amortissement, les charges annuelles (électricité, maintenance …) représentent 2/3 €/ m3 ».

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Michel Adam, éleveur à Plabennec La station de traitement a été positionnée près de la fosse à lisier existante. Le pilotage du traitement se fait par informatique, comme sur toutes les stations

 

Le GIE  Kermagon à Plougar, une station « smelox » pour 2 éleveurs

En 2004, deux éleveurs voisins de la commune de Plougar ont mis en service une unité de traitement de lisier appelée « smelox » (procédé EVALOR). Les deux élevages comptent 430 truies (naisseur/engraisseur) et emploient deux personnes chacun. Le procédé « smelox » est une variante du procédé biologique qui peut fonctionner à poste fixe (comme à Plougar) ou qui peut être mobile. Le procédé « smelox » fonctionne en trois temps qui s’enchaînent en flux continu. 1 Centrifugation du lisier : cette étape permet de capter les éléments en suspension et le phosphore. 2 Séparation de la phase liquide et de la phase gazeuse : au cours de cette étape, l’effluent est épuré de son ammoniac qui passe sous forme gazeuse. 3 Les gaz chargés en ammoniac sont oxydés dans un pot catalytique. Cette ultime étape produit de l’azote gazeux et de la vapeur d’eau. Dans ce procédé, le lisier qui arrive par canalisation est transformé en deux produits : un résidu solide riche en phosphore (comme pour le procédé biologique) qui est exporté dans les régions céréalières et un liquide épuré en azote et en phosphore qui est stocké dans une lagune avant épandage par irrigation. Selon Yvon Priser, l’un des deux éleveurs, « le choix s’est porté sur ce procédé, car on est en présence d’un ensemble plus compact : une fosse d’homogénéisation du lisier, un hangar, une machine et une lagune. Notre installation traite 8 000 m3 de lisier par an. Le coût d’installation a été de 400 000€, ce qui représente un coût de fonctionnement de 8 / 9 €/m3. » On est en présence d’une installation deux fois plus petite que la station de Milizac (ci-dessus) avec des coûts de traitement de même niveau.

Particularité : le procédé smelox mobile
Ce système de traitement de lisier présente l’intérêt de pouvoir être mobile. C’est un procédé qui convient bien aux élevages ayant peu d’excédents à traiter. La machine est installée sur une remorque qui peut se déplacer d’une exploitation à une autre. Il en existe trois sur le Pays de Brest pour une quinzaine d’éleveurs.

Michel Adam est agriculteur à Plabennec depuis 1984. Il a repris l’exploitation des parents spécialisée en production laitière et a mis en place un élevage de porc. Aujourd’hui l’exploitation produit du lait (quota de 550 000 l) et des porcs (350 truies et l’engraissement). Selon les obligations imposées par la directive nitrate, les élevages qui dépassaient un certain seuil de production de lisier ont été obligés de traiter le lisier. « Du fait de mes deux productions, j’ai été concerné, l’exploitation produit 12 000 m3 de lisier par an. Pour respecter la réglementation, j’étais dans l’obligation de traiter de 9 000 à 10 000 m3 de lisier par an. En faisant les calculs, j’atteignais 340 unités d’azote organique à l’ha, alors que le seuil imposé par la réglementation était de 170 unités d’azote à l’ha. J’ai décidé d’investir dans le traitement de lisier, car de mon point de vue, il devenait nécessaire d’améliorer la qualité de l’eau. On était sous la pression de la société, il fallait agir. Mon choix s’est orienté vers le traitement biologique à cause du volume à traiter et j’ai bénéficié de l’appui technique de mon groupement de producteurs PRESTOR pour la conception et pour le suivi. J’ai positionné l’installation près de l’élevage de porc de manière à réduire les coûts et à bénéficier de la fosse déjà existante. Elle a été divisée en plusieurs fosses plus petites pour réaliser les différentes phases du processus. Le coût d’investissement est de 420 000 €. En faisant les calculs, le coût de fonctionnement ramené au kg de porc se situe à 6 centimes d’euros.»

Beaucoup de points communs dans le traitement des effluents agricoles et des effluents urbains !
Une station biologique pour un élevage, le cas de Michel Adam, éleveur à Plabennec

Lors de notre visite, nous étions accompagnés des responsables des stations d’épuration de Brest Métropole Océane, Messieurs Clément et Menez de la société « Eau du Ponant ». De ce fait, l’échange a été particulièrement intéressant, car un parallèle a pu être fait entre les traitements des effluents d’élevage et des effluents urbains.
Premier constat : les deux produits à traiter, le lisier et les effluents urbains, sentent mauvais et les odeurs sont éliminées lors du processus de traitement.
Deuxième constat, les deux produits sont des liquides avec des matières en suspension, mais la concentration est bien plus élevée pour le lisier que pour l’effluent urbain (utilisation de la douche, des machines à laver le linge et la vaisselle….). Pour situer l’écart, un porc produit un m3 de lisier par an, pour un humain, c’est 30 m3 d’effluents par an.
Troisième constat : dans les deux cas, les procédés de traitement sont les mêmes.
Quatrième constat : les produits issus du traitement ont une destination différente. Pour le lisier, les produits retournent à la terre. Pour les effluents urbains, les produits solides sont incinérés et les produits liquides épurés sont rejetés dans le milieu (en rade de Brest). De ce fait des contrôles drastiques existent sur ces rejets.